Le contrat d’assurance est avant tout un contrat, soumis aux dispositions du Code civil. En particulier, l’article 1103 du Code civil (ancien article 1134) énonce : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».
Pour apprécier la mobilisation de ce contrat d’assurance, il faut donc se reporter au contrat, pris en toutes composantes, incluant notamment des conditions générales, auxquelles des contions particulières peuvent renvoyer.
La réforme du Code civil opérée par l’Ordonnance du 10 Février 2016 est venue confirmer cette technique du renvoi, l’article 1119 du Code civil énonçant :
« Les conditions générales invoquées par une partie n’ont effet à l’égard de l’autre que si elles ont été portées à la connaissance de celle-ci et si elle les a acceptées.
En cas de discordance entre des conditions générales invoquées par l’une et l’autre des parties, les clauses incompatibles sont sans effet.
En cas de discordance entre des conditions générales et des conditions particulières, les secondes l’emportent sur les premières »
Il est donc important pour l’assureur qui entend se prévaloir de clauses (souvent d’exclusion) qui figurent aux Conditions Générales, de pouvoir rapporter la preuve que l’assuré en a pris connaissance.
La Cour de cassation a pu valider déjà antérieurement la technique du renvoi aux conditions générales, dont l’assuré est réputé avoir pris connaissance en signant les conditions particulières (C.Cass., Civ. 2ème, 13 Septembre 2018, n°17-23160 ; C.Cass., Civ. 2ème, 3 Mars 2011, n°10-11826).
Il n’est donc pas nécessaire d’exiger que les conditions générales portent la signature de l’assuré (C.Cass., Civ. 2ème, 13 Septembre 2018, n°17-23160).
Au travers des conditions particulières, il faut apprécier la technique du renvoi. Ainsi, la Cour de cassation :
- a admis l’opposabilité des conditions générales pour un assuré qui avait apposé sa signature sous la mention dactylographiée du contrat selon laquelle « l’assuré reconnaît avoir reçu ce jour un exemplaire des conditions générales » (Cass., Civ. 2ème, 17 Janvier 2019, n°17-26750)
- a refusé l’opposabilité d’une clause d’exclusion figurant aux conditions générales car « l’assuré n’avait pas signé la deuxième page des conditions particulières qui seule renvoyait aux conditions générales, et que l’assureur n’établissait pas avoir porté à la connaissance de ce dernier la clause d’exclusion de garantie avant la survenance du sinistre » (Cass., Civ. 2ème, 6 Octobre 2011, n°10-15370).
C’est sur cette question que revient l’arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation du 21 Septembre 2022 (C.Cass., Civ. 3ème, 21 Septembre 2022, n° 21-21014) revient.
Sur le plan factuel :
- et Mme [T] ont commandé à la société Leroy Merlin la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques en intégration toiture à la place de la couverture existante d’une maison d’habitation.
- La société Leroy Merlin a sous-traité la pose des panneaux à la société GSLI, assurée auprès de la société Gan assurances.
- Se plaignant d’infiltrations d’eau par la toiture, M. et Mme [T] ont assigné la société Leroy Merlin en indemnisation de leurs préjudices.
- La société Groupama, assureur des maîtres de l’ouvrage, est intervenue volontairement et la société Gan assurances a été appelée en intervention forcée.
La Société GAN a opposé une clause d’exclusion de garantie figurant aux conditions générales à une convention annexe, qui déniait toute prise en charge des dommages résultant d’ouvrages réalisés à l’aide de procédés de techniques non courantes.
Par un arrêt en date du 27 Mai 2021, la Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE a notamment condamné la Société GAN (assureur du sosu-traitant GSLI) à garantir la Société Leroy Merlin des condamnations prononcées au bénéfice des Epoux T et de Groupama. Pour écarter la clause d’exclusion de garantie, la Cour d’appel a retenu que « l’offre d’assurance émise le 19 mai 2009, acceptée par la société GSLI le 8 juin 2009, si elle fait référence en première page à ces documents et comporte une signature de la société GSLI, cette signature figure uniquement en dernière page et non en première page, sur laquelle seul un cachet de la société a été apposé ».
La Société GAN a formé un pourvoi, invoquant une violation de l’ancien article 1134 du Code civil.
Sous le visa de cet article, la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation rappelle qu’il « se déduit de ce texte que sont opposables à l’assuré les conditions générales dont il reconnaît avoir pris connaissance et qu’il a acceptées avant le sinistre« , avant de censurer le raisonnement de la Cour d’appel puisqu’il « résultait de ces constatations que l’assuré avait eu connaissance des conditions générales et des annexes au moment de la signature du contrat d’assurance et les avait acceptées ».
La signature en dernière page des conditions générales, alors que le renvoi aux conditions générales figure en 1ère page, suffit à démontrer que l’assuré est réputé en avoir connaissance. Il aurait pu en être différemment si le renvoi était indiqué sur une page postérieure à la signature.
Une fois le renvoi aux clauses d’exclusion figurant aux conditions générales validé, il restera à vérifier si ces clauses
- sont formelles et limitées (, Civ. 1ère, 22 mai 2001, n°99-10849)
- ne vident pas de leur substance la garantie souscrite (, Civ. 1ère, 14 janvier 1992, n°88-19313)