Marché privé à forfait et prix : La norme NF P 03-001 (version 2000) ne peut prévaloir sur les dispositions du contrat (C.Cass., Civ. 2ème, 21 mars 2019, n° 17-31540)

(C.Cass., Civ. 2ème, 21 mars 2019, n° 17-31540)

De l’importance pour l’entreprise de bien définir les travaux nécessaires à la réalisation des ouvrages commandés et d’évaluer le montant de son devis dans le cadre d’un marché à forfait.

En l’espèce, les circonstances du chantier ont amené une entreprise à réaliser des travaux non prévus à son marché (réception en mars 2005). Elle en a ensuite demandé indemnisation à son cocontractant, en invoquant les dispositions de la norme NF P 03-001 relative aux marchés privés de travaux (version décembre 2000), visée dans le marché à forfait.

Pour faire droit à la demande d’indemnisation, la Cour d’appel de TOULOUSE retient que la « norme NF P 03-001 mentionne que les prix rémunèrent l’entrepreneur de tous ses débours, charges et obligations normalement prévisibles« .

L’arrêt est censuré sous le visa de l’article 1793 du Code civil, qui prescrit que :

« Lorsqu’un architecte ou un entrepreneur s’est chargé de la construction à forfait d’un bâtiment, d’après un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol, il ne peut demander aucune augmentation de prix, ni sous le prétexte de l’augmentation de la main-d’œuvre ou des matériaux, ni sous celui de changements ou d’augmentations faits sur ce plan, si ces changements ou augmentations n’ont pas été autorisés par écrit, et le prix convenu avec le propriétaire »

La Cour de cassation retient que :

  • la norme NF P 03-001 ne peut prévaloir sur les dispositions du contrat
  • les travaux supplémentaires (minage et modification du canal de dévalaison) n’avaient été ni autorisés par écrit, ni ratifiés de manière non équivoque par le maître d’ouvrage
  • l’augmentation du coût des matières premières, qui n’avait pas fait l’objet d’un accord entre les parties, ne constituait pas une circonstance imprévisible pour l’entreprise.

Depuis Octobre 2017, une nouvelle version de cette norme a été publiée, intégrant la réforme du Code civil de 2016 avec en particulier l’article 1195 du Code civil, concernant la théorie de l’imprévision, qui énonce que :

« Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.

En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe »

 

En se plaçant dans le cadre du marché à forfait édicté par l’article 1793 du Code civil, l’entrepreneur risque d’être réputé avoir assumé le risque, et pourrait donc perdre le bénéfice de l’article 1195 du même Code, outre qu’en toute hypothèse, le Juge sera très vigilant sur le critère d’imprévisibilité et que tout défaut de conception ou d’anticipation de l’entreprise sera sanctionné par le rejet d’une demande de révision.

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