Par son arrêt (non publié) du 10 Juin 2021 (C.Cass., Civ. 3ème , 10 Juin 2021, n° 20-13387), la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation a l’occasion de rappeler l’importance, pour tout constructeur, de veiller à effectuer des travaux en rapport avec les activités déclarées.
Cette question revient régulièrement en jurisprudence.
Sur la question des activités déclarées, la jurisprudence a déjà pu valider une non-garantie pour
- Une entreprise qui avait conclu un contrat de construction de maison individuelle alors qu’elle « avait souscrit un contrat d’assurance garantissant uniquement les travaux de techniques courantes correspondant aux activités déclarées de gros œuvre, plâtrerie – cloisons sèches, charpentes et ossature bois, couverture- zinguerie, plomberie – installation sanitaire, menuiserie – PVC» (, Civ. 3ème, 18 octobre 2018, pourvoi n°17-23741)
- une entreprise générale qui sous-traite la totalité des travaux et exerce une mission de maîtrise d’œuvre (, Civ.3ème, 18 avril 2019, pourvoi n°18-14028).
Les difficultés proviennent surtout des procédés techniques employés pour l’exercice de l’activité déclarée. Ainsi, la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation a déjà pu valider une non-garantie pour :
- Une entreprise qui « avait souscrit une police garantissant ses responsabilités civile et décennale en déclarant l’activité n° 10 « Etanchéité sur supports horizontaux ou inclinés exclusivement par procédé Paralon» alors qu’elle a « mis en œuvre un procédé d’étanchéité Moplas sbs et non un procédé Paralon » (, Civ. 3ème, 8 novembre 2018, pourvoi n°17-24488)
- Une entreprise souscriptrice qui n’avait pas réalisé ses travaux en respectant le procédé déclaré (procédé Harnois ; (, Civ. 3ème, 30 Janvier 2019, pourvoi n°17-31121: « la cour d’appel a exactement retenu qu’au regard de la réalisation de ce type de travaux, conformément à des techniques particulières nécessitant des compétences spécifiques que l’entrepreneur était supposé détenir à la date de la souscription de son contrat d’assurance, les parties avaient entendu limiter la garantie de l’assureur en sorte que le recours au procédé Harnois contenu dans la clause relative à l’objet du contrat ne constituait pas une simple modalité d’exécution de l’activité déclarée, mais cette activité elle-même »).
- Le procédé Harnois, impliquant des techniques particulières nécessitant des compétences spécifiques, que l’entrepreneur était supposé détenir à la date de la souscription de son contrat d’assurance, les parties avaient entendu limiter la garantie de l’assureur de sorte que le recours au procédé Harnois contenu dans la clause relative à l’objet du contrat ne constituait pas une simple modalité d’exécution de l’activité déclarée, mais cette activité elle-même (Cass., Civ.3ème, 16 Janvier 2020, n°18-22108).
Tout n’est cependant pas gagné pour l’assuré puisqu’en cas d’activités multiples, il faut vérifier si les désordres correspondent à une activité déclarée, ou non, l’assureur
- ne pouvant exclure sa garantie lorsque le désordre provient de manière prépondérante de l’activité déclarée qui est assurée (, Civ. 3ème, 9 Juin 2004, pourvoi n° 03-10173; Cass., Civ. 3ème, 11 juillet 2019, pourvoi n°18-18477 et récemment C.Cass., Civ. 3ème, 9 Juillet 2020, n° 19-13568)
- pouvant exclure sa garantie lorsque le dommage provient principalement de l’activité non garantie (C.Cass, Civ. 3ème, 12 Mai 2010, pourvoi n° 08-20544).
Encore récemment, la Cour de cassation a validé un refus de garantie pour :
- des travaux de couverture alors que seules les activités « maçonnerie, béton armé, structure et travaux courants » avaient été souscrites (Cass., Civ. 3ème, 5 Mars 2020, n°18-15164)
- des travaux de pose d’une piscine alors que seule l’activité « fabrication industrielle et la vente de piscines en bois en kit » avait été souscrite (Cass., Civ. 3ème, 1/10/2020, n° 19-16496)
En l’espèce, sur le plan factuel et procédural, il convient de retenir que
- [Q], ayant souscrit une assurance multirisque professionnelle auprès de la société MGARD, pour une activité déclarée de « paysagiste jardinier », a réalisé des travaux pour M. et Mme [G], propriétaires d’un pavillon et assurés auprès de la MACIF.
- Les copropriétaires voisins s’étant plaints d’un risque d’effondrement du mur les séparant de la propriété de M. et Mme [G] et fragilisé par les travaux de M. [Q], ont, après expertise, obtenu la condamnation de M. et Mme [G] et de leur assureur à exécuter les travaux de confortement provisoire.
- et Mme [G] et la MACIF ont assigné M. [Q] et la société MGARD en remboursement et indemnisation.
Par un arrêt en date du 21 Janvier 2020, la Cour d’appel d’AMIENS a notamment débouté les Epoux G de leur action directe contre la Société MGARD, retenant que :
- les services d’aménagement paysager étaient définis par l’INSEE comme la plantation, les soins et l’entretien de parcs et jardins
- il ressortait du rapport d’expertise que les travaux réalisés par M. [Q] étaient des travaux de terrassement, de type fouille en pleine masse, avec excavation sur plusieurs mètres de hauteur et évacuation de plusieurs dizaines de mètres cubes de sol.
Les Epoux G et leur assureur MRH ont formé un pourvoi, qui est rejeté par la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation, celle-ci :
- rappelant que la garantie de l’assureur ne concerne que le secteur d’activité professionnelle déclarée par l’assuré.
- relevant que l’assurance multirisque professionnelle, signée par le constructeur le 3 octobre 2012, concernait son activité de paysagiste jardinier.
- approuvant le raisonnement de la Cour d’appel conduisant à l’exclusion de garantie.
Il sera relevé au passage la référence effectuée par la Cour d’appel, reprise par la Cour de cassation, à la définition donnée par l’INSEE, qu’il conviendrait de mettre en perspective avec l’éventuelle référence contenue dans le contrat d’assurance.