Avant la publication du Décret n° 2019-650 du 27 Juin 2019, le Syndic devait être habilité par le Syndicat des copropriétaires pour introduire une action en justice. Ainsi, faute d’habilitation régulière, l’assignation délivrée se trouvait privée d’effet (C. Cass., Civ. 2ème, 15 Novembre 2018, pourvoi n° 17-50051), la Cour de cassation ayant précisé que chaque désordre dénoncé doit être visé dans l’habilitation initiale donnée au Syndic, et qu’en cas d’oubli, une régularisation n’est possible qu’à la condition qu’une résolution soit votée avant l’expiration du délai d’épreuve décennal (C.Cass, Civ. 3ème, 21 mars 2019, pourvoi n°17-28021).
L’article 12 du Décret du 27 Juin 2019 est venu modifier l’article 55 du Décret n° 67-223 du 17 Mars 1967, en insérant la phrase suivante : « Seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l’absence d’autorisation du syndic à agir en justice ».
L’alinéa 2ème de l’article 55 du Décret dispensait déjà depuis le Décret du 9 Juin 1986 (dispense déjà donnée par la jurisprudence dès 1981 selon C.Cass., Civ. 3ème, 7 Janvier 1981, n° 79-12508) le Syndic d’une habilitation pour défendre le Syndicat.
La Cour de cassation avait de même déjà admis qu’il n’était pas nécessaire que le Syndic soit habilité par le SDC pour former un appel en garantie lorsque le SDC était lui-même défendeur. La qualité de défendeur à l’instance valant dispense d’habilitation pour former un appel en garantie (C.Cass., Civ. 3ème, 30 novembre 2004, n°00-20453).
La Cour de cassation a récemment confirmé confirmer sa jurisprudence par un arrêt publié du 27 Février 2020 (C.Cass., Civ. 3ème, 27 Février 2020, n° 19-10887), au sujet de l’appel en garantie du SDC contre son assureur.
Se pose néanmoins la question de l’entrée en vigueur des dispositions du Décret du 27 Juin 2019 et son articulation avec les instances déjà en cours, introduites par un Syndic dépourvu d’habilitation par le SDC.
La Cour de cassation apporte une réponse, intéressante sur le plan pratique.
Les données factuelles sont simples :
- les 11, 12, 13 et 14 septembre 2012, se plaignant de désordres dans le système de chauffage-climatisation, le s yndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier Le Forum a, après expertise, assigné en réparation de son préjudice l’assureur dommages-ouvrage, les constructeurs et leurs assureurs.
- Se prévalant du défaut d’habilitation du syndic, ceux-ci ont, antérieurement à l’audience de plaidoirie du 29 janvier 2019, signifié des conclusions d’incident demandant l’annulation des assignations
- Par un arrêt en date du 14 Novembre 2019, la Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE a prononcé la nullité des assignations et des conclusions du SDC à l’égard de l’assureur DO, des constructeurs et de leurs assureurs.
Le SDC a formé un pourvoi, estimant que le défaut d’intérêt à agir a été soulevé non pas par les copropriétaires, mais par les constructeurs et leurs assureurs.
Le pourvoi est cependant rejeté par la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation qui rappelle que :
- l’article 12 du décret n 2019-650 du 27 juin 2019 a inséré, après le premier alinéa de l’article 55 du décret du 17 mars 1967, un alinéa aux termes duquel seuls les copropriétaires peuvent se prévaloir de l’absence d’autorisation du syndic à agir en justice.
- publié au Journal officiel du 28 juin 2019, ce texte est, en l’absence de disposition spécifique, entré en vigueur le 29 juin 2019.
- Si, relatif à la procédure, il est immédiatement applicable aux instances en cours à cette date, il n’a pas pour conséquence, en l’absence d’une disposition expresse, de priver de leurs effets les actes qui ont été régulièrement accomplis sous l’empire du texte ancien, se référant en ce sens à la décision de 2ème Chambre civile de la Cour de cassation du 30 Avril 2003 (Cass., Civ. 2ème,, 30 Avril 2003, n°00-14333)
La Cour de cassation en déduit que le Décret du 27 Juin 2019 n’est appelé à régir les exceptions de nullité tirées du défaut d’autorisation donnée au syndic pour agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires que si celles-ci ont été présentées à compter du 29 juin 2019 avant d’estimer que :
- Les conclusions d’incident ayant été signifiées antérieurement à cette date, c’est sans encourir le premier grief du moyen que la cour d’appel a statué en l’état du droit antérieur à l’application du décret du 27 juin 2019.
- ayant relevé que l’assemblée générale du 20 mai 2011 avait autorisé le syndic à agir en justice aux fins d’obtenir notamment le rétablissement des désordres et/ou le remboursement de leur coût, la cour d’appel a pu en déduire que cette autorisation ne définissait pas suffisamment les actions que le syndicat entendait ainsi autoriser ou ratifier.
Le Décret du 27 Juin 2019 n’a donc pas pu sauver l’action mal engagée.